Erwann Créac’h : un vétérinaire sous les rojecteurs

Erwann Créac’h est un jeune vétérinaire au parcours assez atypique. Tout d’abord, il est vétérinaire urgentiste, ce qui est un aspect de la profession moins connu que celle des praticiens exerçant en cabinet ou en clinique. Ensuite, c’est un artiste, au sens noble du terme, qui s’est découvert sa passion pour le théâtre, le cinéma – tant du côté de l’écriture, de la mise en scène, du jeu d’acteur que de la production – sur le tard. Enfin, c’est un auteur de talent puisque son dernier livre « Carnivores domestiques » (aux éditions Edite) vient de recevoir le prix littéraire 30 Millions d’Amis. 

Vétérinaire de formation, après des études à l’ENV de Nantes, Erwann Créac’h a ce que l’on pourrait appeler une forme de révélation. 

S’il exerce encore actuellement son métier d’urgentiste vétérinaire à domicile à Paris, en banlieue et grande banlieue parisienne principalement le soir et le week-end au sein d’une unité qui compte une trentaine de praticiens, Erwann Créac’h troque le reste du temps sa « blouse » contre un tout autre ‘’uniforme’’. Celui de metteur en scène, comédien et, surtout, producteur au sein de la société qu’il a co-fondé, Overlap Films (films de fiction et documentaires). 

« La souplesse de mon emploi du temps me permet de me consacrer à mes autres occupations », explique-t-il. Même si l’on s’en doute, cela représente beaucoup de travail, beaucoup d’heures. 


Une révélation tardive


Rien n’aurait laissé penser que plus jeune, il nourrissait ce désir de s’investir dans une carrière artistique. Par timidité, il avoue d’ailleurs qu’il n’a jamais osé exprimer ce désir, franchir le pas. « Même lors de mes études vétérinaires à l’école de Nantes, je n’ai pas participé aux ateliers de théâtre qui y étaient proposés ! » 

Ce désir de passer à autre chose est donc venu assez tardivement. « Mais lorsque j’ai ouvert la boîte de Pandore, après avoir commencer par du théâtre, que j’ai enfin eu la curiosité d’assouvir ce désir, je me suis rendu compte que ma profession scientifique ne me suffisait plus », poursuit-il. 

Ces deux aspects, ces deux mondes qu’il côtoie, sont pourtant bien différents, bien éloignés l’un de l’autre. D’un côté son métier de vétérinaire urgentiste lui fait rencontrer des maîtres et maîtresses à leur domicile, un contexte qui n’a rien à voir avec une clientèle en clinique ou cabinet vétérinaire. « 90 % des visites ont lieu après l’heure de fermeture des cabinets vétérinaires. Nous sommes parfois appelés par des personnes qui ne peuvent pas se déplacer ou bien alors qui sont dans une situation de panique et ne supportent pas l’incertitude face à leur animal de compagnie qui est malade ou qui souffre. »

L’assurance santé animale, la mutuelle pour chien et chat, ne lui est pas inconnue : « C’est une bonne chose que ce type d’assurance santé pour chien et chat existe, car cela permet d’assurer financièrement en cas de besoin. C’est une tranquillitéen cas de gros pépin ou de grosses dépenses. Les maîtres sont très angoissés par la maladie, les accidents, etc. qui peuvent toucher leurs compagnons. Je remplie souvent des formulaires de remboursement et il y a aussi des gens qui questionnent sur l’assurance santé animale. Une partie d’entre eux en connaît l’existence. C’est aussi une tranquillité pour les vétérinaires qui sont ainsi assurés que les maîtres pourront supporter les frais des interventions. »

Erwann Créac’h se rend aussi bien au chevet des chiens, des chats que des NAC (nouveaux animaux de compagnie), même si les deux premiers constituent la majorité des consultations. 

Le rôle de vétérinaire urgentiste, s’il ressemble à celui des médecins qui se déplacent à domicile, présente quelques différences. « Nous faisons plus de choses », explique Erwann Créac’h. « Ainsi, nous pouvons réaliser des prises de sang ou pratiquer de petites chirurgie, comme des sutures par exemple. Nous sommes davantage interventionnistes. »

Mais la grande différence d’avec les consultations en cabinet réside dans le lien qui s’instaure entre lui et les maîtres. « Nous sommes dans leur milieu, leur salon ou leur chambre, nous entrons en fait dans leur intimité. »

Et ce « rapprochement » donne lieu à bien des confidences. « L’animal est la porte d’entrée, mais souvent les maîtres nous parlent d’eux, de leurs angoisses, de leurs propres inquiétudes », explique encore Erwann Créac’h. « Ils se livrent beaucoup et souvent sur eux-mêmes. »

C’est cela qui lui a d’ailleurs donné l’idée d’un livre, un recueil de portraits de ces gens qu’il a rencontrés au fil de ses interventions : « Carnivores domestiques », paru aux éditions Edite. Un livre avec lequel il a remporté le prix littéraire 30 Millions d’Amis (voir encadré). 


Urgentiste vétérinaire : un métier rempli d’émotions fortes


« Ce livre est constitué de tranches de vie. Il est à l’image de la société urbaine contemporaine. Nous sommes souvent confrontés à des situations dramatiques », explique Erwann Créac’h sous sa casquette d’auteur. Il reconnaît qu’il faut « encaisser la souffrance, les larmes aussi parfois. C’est la facette la plus difficile de ce métier. On se blinde, mais ce n’est pas toujours facile, on reste très sensibles. » 

Le portrait qui a sans doute le plus marqué Erwann Créac’h et qu’il relate dans son livre est celui d’un homme qui tentait de sauver un pigeon déjà mort. « Il voyait en lui la réincarnation de son fils disparu. Il était proche de la folie et m’a donc entraîné dans l’irrationnel. »


Deux métiers, deux mondes différents


Alors que la médecine humaine fait souvent l’objet de scenarii pour la télé ou le cinéma, le milieu vétérinaire, pourtant « riche » est très peu adapté. Cela a-t-il donné l’idée à Erwann Créac’h de se pencher sur ce projet ? « Je travaille actuellement sur un court-métrage adapté des nouvelles de mon livre et une chaine de télé semble intéressée également », confie le jeune homme, en croisant les doigts. 

Car ce métier, son autre passion, est plus difficile. « Ce monde est moins balisé que celui de la profession vétérinaire », admet Erwann Créac’h. « Il y a beaucoup de prétendants pour peu d’élus. Chaque projet est un challenge, une remise en cause et la compétition est permanente. Il n’y a pas de numerus clausus, c’est un monde très vaste où chacun peut se déclarer comédien, metteur en scène, etc. »

Claude Pacheteau

« Carnivores domestiques » : un livre plébiscité par le jury

Sorti en mai, le livre de Erwann Créac’h a fait partie des onze finalistes en liste pour le prix littéraire de 30 Millions d’amis, le « Goncourt des animaux ». 

Et c’est au final celui-ci qui a remporté le premier prix, salué entre autres par Michel Houellebecq, un des membres du jury aux côtés de Jean-loup Dabadie, Frédéric Vitoux de l’Académie Française, Didier Van Cauwelaert, Françoise Xenakis, Irène Frain, Reha Kutlu-Hutin, Annie Duperey, Didier Decoin, et Robert Sabatier de l’académie Goncourt. 

Une belle récompense pour son auteur. « On aime ou on n’aime pas Michel Houellebecq, mais il a le courage d’aborder dans ses livres les facettes les plus sombres de l’humanité. Il a soutenu mon livre et j’en suis très fier », explique Erwann Créac’h. 

« C'est une série de nouvelles avec un personnage récurrent, un vétérinaire urgentiste qui intervient chez les gens », a confié Michel Houellebecq dans une interview au Figaro au sujet de ce livre. « Il découvre l'animal et en même temps son contexte familial. C'est une traversée de la société vue par le filtre de l'animal. Chaque personnage a une relation particulière avec son animal. Mais leur réaction face à la maladie est identique. La maladie et la mort nous égalisent. »

Nul doute que cela motive Erwann Créac’h et il compte bien que ce coup de projecteur sera aussi un coup de pouce à son autre carrière. 

Déjà, il planche sur d’autres projets avec, en plus d’un long-métrage, une intervention au Centre Pompidou dans le cadre du festival Hors-Piste sur le thème… des carnivores domestiques, bien évidemment ! 

 

Le parcours de Erwann Créac’h

Né en 1973, Erwann Créac’h est vétérinaire de formation. Il entre d'abord dans l'administration où il travaille aux questions vétérinaires de santé publique (la "vache folle"), mais il interrompt cette brève carrière pour se tourner  vers le théâtre. Il entre au Cours Florent, devient comédien (Théâtre de l'Epée de bois), puis auteur et metteur en scène (Compagnie du Ouessant).

« Si j'étais un homme » aborde les remous de l'identité masculine, sur le ton de la comédie. Les représentations sont suivies de débats avec le public.  

Il s'intéresse également au cinéma, où il fait son apprentissage en passant par différents métiers (régisseur, assistant réalisateur, assistant de production). 

Tout en poursuivant l'écriture, il se tourne alors résolument vers la production, et s'associe pour créer sa société Overlap Films (films de fiction et documentaires). Noces Ephémères, le premier long-métrage, tourné en Iran, sort en salle en 2011. Erwann Créac’h avoue qu’il est encore très occupé avec cette production franco-iranienne. 

« Carnivores Domestiques » est son premier roman (Editions E/dite), illustré par Olivsteen, 184 pages, 18 €.




Pour en savoir plus sur Erwann Créac’h, son livre et ses passions, visitez ces deux sites : 

www.overlapfilms.com/ 

www.carnivoresdomestiques.fr

E-mail : erwann.creach@hotmail.com 





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Photos DR